PARIS—Le projet de la maison d’édition Gallimard de rééditer les pamphlets antisémites de Louis-Ferdinand Céline a suscité l’émoi et la polémique en France.
Gallimard a finalement pris la décision de ‘’suspendre’’ cette publication.
Interpellé par le Délégué interministériel à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT et critiqué notamment par le Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), Serge Klarsfeld, président de l’association Fils et filles de déportés juifs de France, et par le député France insoumise Alexis Corbière, Gallimard avait jusqu’à maintenant maintenu son projet de rééditer les pamphlets “Bagatelles pour un massacre”, “L’École des cadavres” et “Les beaux draps”.
Mais dans un communiqué à l’Agence France Presse, le PDG de la maison d’édition, Antoine Gallimard, invoque sa «liberté d’éditeur» et sa «sensibilité à son époque», en estimant que «les conditions méthodologiques et mémorielles ne sont pas réunies pour envisager sereinement» ce projet de réédition. «Les pamphlets de Céline appartiennent à l’histoire de l’antisémitisme français le plus infâme. Mais les condamner à la censure fait obstacle à la pleine mise en lumière de leurs racines et de leur portée idéologiques, et crée de la curiosité malsaine, là où ne doit s’exercer que notre faculté de jugement», estime aussi l’éditeur.
Mais, ajoute-t-il, «je comprends et partage l’émotion des lecteurs que la perspective de cette édition choque, blesse ou inquiète pour des raisons humaines et éthiques évidentes».
“Je suis soulagé. C’était une bataille difficile à gagner car elle ne se passait pas devant des magistrats mais devant la société”, a réagi Serge Klarsfeld.
Pour lui, “aucun appareil critique ne peut résister aux torrents des délires de Céline” et à la “force convaincante” de l’écrivain.
“C’est une décision sage que de reporter sine die cette réédition, et pour nous c’est une satisfaction”, a dclaré Francuis Kalifat, président du Crif.
‘’Céline exprimait sa haine des Juifs – pas seulement des Juifs d’ailleurs, mais aussi des Noirs. Ce sont des brûlots antisémites et racistes qui tomberaient sous le coup de la loi s’ils étaient publiés aujourd’hui”, a-t-il ajouté.