Alors que des pourparlers sont actuellement en cours à Vienne sur le programme nucléaire iranien, un haut responsable des Forces de défense israéliennes (IDF) a déclaré que ”selon notre évaluation, l’Iran est à un mois de pouvoir enrichir suffisamment d’uranium pour une bombe nucléaire, s’il le décide”.
”Nous devons être préparés militairement”, a-t-il ajouté, précisant que l’armée israélienne a créé une nouvelle direction chargée des questions iraniennes, notamment de ses “activités régionales malveillantes”.
Le responsable militaire s’est exprimé lors d’un briefing en ligne pour les journalistes organisé par la Europe Israel Press Association (EIPA), en compagnie de deux experts de haut niveau qui ont donné leur avis sur la possibilité de revenir au Joint Comprehensive Action Plan of Action (JCPOA), l’accord nucléaire de 2015 entre les puissances mondiales et l’Iran, et sur la manière d’empêcher Téhéran d’acquérir la bombe nucléaire.
Sima Shine, une ancienne haut fonctionnaire du Mossad et actuellement chercheur à l’Institut d’études de sécurité nationale (INSS), le groupe de réflexion le plus influent d’Israël, a déclaré que pour la première fois, l’Iran a commencé à enrichir à 60 %, ce qu’il n’avait jamais fait auparavant.
”Si l’Iran décide d’enrichir à un niveau militaire au-delà de 90%, il aura suffisamment de matière fissile pour un premier dispositif nucléaire dans trois semaines”, a-t-elle déclaré.
”Plus le programme progresse, plus la tentation est grande de ne pas revenir à l’accord nucléaire et d’atteindre le seuil de la capacité nucléaire”, a-t-elle ajouté.
”Avec le fait que depuis février, l’Iran ne permet pas aux inspecteurs de l’AIEA de se rendre sur certains sites, nous ne savons pas ce qui se passe en Iran avec toute cette quantité d’uranium enrichi. Utilisent-ils un endroit secret où ils peuvent enrichir jusqu’à 90 % ?
”C’est la raison pour laquelle nous entendons non seulement les Israéliens et les Américains mais aussi les Britanniques et les Français parler du fait que nous perdons du temps, que le temps est compté et que quelque chose devrait se passer : soit l’Iran décide de revenir en arrière, soit il y aura une rupture dans les négociations, même si aucune partie ne le déclarera formellement. Bien sûr, les États-Unis veulent la solution diplomatique et ils la laisseront toujours ouverte. C’est également une partie de la raison pour laquelle l’Iran pense et croit que lorsqu’il décide de revenir en arrière, il peut le faire parce que l’autre partie souhaite une solution diplomatique politique”, a ajouté l’expert de l’Iran.
Du point de vue d’Israël, Sima Shine a souligné que ”la perception de la menace est très différente de la perception de la menace en Europe et bien sûr à Washington”.
”Pour Israël, c’est une question d’urgence alors que les Etats-Unis pensent qu’il y a encore assez de temps pour permettre à la voie diplomatique de montrer à tous qui est à blâmer pour ne pas revenir à l’accord”, a-t-elle dit.
Sima Shine a déclaré qu’aucun des scénarios actuellement en discussion à Vienne n’était bon pour Israël et qu’un retour au JCPOA était le moins mauvais. Mais si cela ne se produit pas – ce qui est le scénario le plus probable à l’heure actuelle – une décision sur l’opportunité d’utiliser la force militaire sera sur la table, a-t-elle dit.
“Il n’y a pas de bonnes solutions. Je suggère donc de revenir au scénario le moins mauvais, qui est un retour au JCPOA”, a-t-elle déclaré.
Bruno Tertrais, directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique (FRS), le principal groupe de réflexion en France sur les questions de sécurité internationale, a qualifié d’improbable le retour de toutes les parties au JCPOA. ”Quiconque pense que le JCPOA peut être sauvé se fait des illusions, car la dimension militaire du programme nucléaire iranien est très avancée. L’Iran s’approche de la capacité d’armement à la vitesse de l’éclair. Le JCPOA est mort et ne peut être ressuscité”, a-t-il déclaré.
Pour lui, seul un accord dit “moins pour moins” est réaliste. Pour les experts, cela signifie une levée partielle des sanctions. En échange, toutefois, l’Iran devrait s’engager à réduire ou au moins à arrêter son enrichissement d’uranium, ce qu’il n’a pas fait au cours de l’année écoulée.