PARIS (EJP)—Le ministre français de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, a affirmé sa volonté d’ériger la lutte contre le racisme et l’antisémitisme en “cause nationale” face à un phénomène en recrudescence, quelques jours après l’agression à caractère antisémite d’un jeune couple juif dans leur appartement de Créteil.
M.Cazeneuve s’est adressé à plusieurs centaines de personnes dans le quartier du port à Créteil- là où a eu lieu l’agression – venues se rassembler contre le racisme et l’antisémitisme à un moment où, comme l’a souligné le ministre, ‘’il connaît le sentiment d’inquiétude qui traverse la communauté juive de France” face à l’antisémitisme, “véritable pathologie sociale”.
Le couple a été séquestré lundi dans son logement, la jeune femme violée et leur appartement cambriolé par trois agresseurs qui, selon des enquêteurs, “partaient de l’idée qu’être juif signifiait que l’on avait de l’argent”.
Pour Bernard Cazeneuve, “ce crime (…) n’est pas un simple fait divers. Derrière ce crime, il n’y a pas seulement un acte lâche, crapuleux et antisémite. Derrière ce crime, il y a un mal qui ronge la République et que nous devons combattre à tout prix”.
“Nous devons faire de la lutte contre le racisme et l’antisémitisme une cause nationale en y associant toutes les administrations intéressées” (…), les associations, les représentants des différents cultes”, a-t-il affirmé, reconnaissant que les actes et menaces antisémites ont augmenté “de plus de 100% au cours des dix premiers mois de l’année”.
“C’est toute la société qui doit se mobiliser”, a de son côté exhorté sur France 2 Manuel Valls, regrettant que la réaction des Français n’ait pas été plus forte après l’agression de Créteil. Selon lui, “on manque d’indignation dans notre société”.
“C’est une très bonne chose mais il faut mettre les moyens adéquats. On ne peut plus être seulement dans les intentions, dans les voeux pieux”, a souligné le grand rabbin de France, Haïm Korsia.
“Si l’Etat ne fait pas de cette cause nationale une ardente obligation, les juifs partiront en masse et la France tombera entre les mains soit de la charia, soit du Front National”, a solennellement prévenu dimanche le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), Roger Cukierman, très applaudi par l’assistance.
‘’Les préjugés antisémites font des dégats considérables. On se sent persécutés par des préjugés moyennâgeux’’, dit-il. Il a demandé à plusieurs reprises que la lutte contre l’antisémitisme soit érigée en ‘’cause d’Etat’’.
La Ligue contre le racisme et l’antisémitisme a également insisté sur le fait que “le temps n’est plus aux déclarations mais aux actes”.
“C’est vrai, on envisage de partir”, confie Sarah Landau qui vit à Créteil depuis neuf ans. “La France aujourd’hui ne ressemble pas à celle que j’ai connue. Mon judaïsme n’a jamais été un problème, mais aujourd’hui c’est une tare pour nos enfants”, estime-t-elle.
Les 500.000 à 600.000 juifs de France forment la première communauté juive d’Europe et la troisième au monde, derrière Israël et les Etats-Unis. Mais pour la première fois, la France est devenue en 2013 le premier pays d’émigration vers Israël avec 4.566 personnes qui ont choisi d’y vivre parque qu’il s’y sentent plus en sécurité que dans l’Hexagone.