PARIS (EJP)—Le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a déclaré vendredi lors du débat à l’Assemblée nationale sur la reconnaissance d’un état palestinien que la France reconnaîtra ‘’sans délai’’ l’Etat de Palestine ‘’si une ultime tentative de solution négociée sous l’égide de la communauté internationale échoue’’
Le chef de la diplomatie française s’exprimait lors du débat sur une proposition de résolution du groupe socialiste visant à reconnaître un Etat palestinien, qui sera soumise à un vote non-contraignant et public mardi prochain.
Le débat très animé à l’Assemblée nationale a montré des lignes de fracture no seulement entre la majorité et l’opposition mais aussi au sein même des partis politiques.
Après les votes de la Suède, du Parlement britannique et du Congrès espagnol en faveur d’une reconnaissance d’un Etat palestinien, le groupe socialiste français défend cette résolution qui ‘’invite le gouvernement à reconnaître l’État de Palestine en vue d’obtenir un règlement définitif du conflit’’ et juge que ‘’”la solution des deux États, promue avec constance par la France et l’Union européenne, suppose la reconnaissance de l’État de Palestine aux côtés de celui d’Israël’’.
Même si elle était adoptée, la résolution n’a aucun caractère contraignant pour le gouvernement français.
Du côté du Parti socialiste, le groupe doit voter très majoritairement en faveur de la résolution. Une dizaine de parlementaires n’ont cependant pas signé la résolution du groupe. Mais le président du groupe socialiste Bruno Le Roux appelle à “dépasser les clivages politiciens” et la porte-parole du groupe, Annick Lepetit a déclaré: “Quand on veut la paix, on s’engage”.
Il faudra reconnaître l’État palestinien “le moment venu”, déclaré Laurent Fabius depuis fin août. Selon lui la question c’est ‘’quand, et comment’’. ‘’Il faut que cette reconnaissance soit utile à un règlement définitif du conflit”.
‘’Sur la question du principe de la reconnaissance de la Palestine – La position de la France a toujours été depuis 1947 qu’il y ait 2 Etats’’, a-t-il précisé.
Les élus de l’opposition UMP, quant à eux, sont partagés entre la non-participation et le votre “contre”. Pour le président du groupe UMP, il s’agit de diplomatie, donc d’un domaine réservé au chef de l’Etat, mais il estime que “ce vote affaiblit la voix de la France”.
Le parti tentera d’établir d’ici le 2 décembre une position du groupe UMP. L’azncien président Nicolas Sarkozy a appelé l’UMP à voter contre la reconnaissance d’un Etat palestinien. “Je me battrai pour que les Palestiniens aient leur Etat. Mais une reconnaissance unilatérale quelques jours après un attentat meurtrier et alors qu’il n’y a aucun processus de paix. Non !”, a-t-il dit.
Le groupe UDI (centre-droit) est lui aussi divisé sur la question et laissera la liberté de vote à ses députés, même si le président du groupe, Philippe Vigier, estime que ce vote “va dans le mauvais sens et que cela va aggraver la situation”. Meyer Habib député UDI des Français établis hors de France, déclare que la résolution aboutit à “reconnaître le terrorisme”. ‘’Jérusalem n’est pas “composée de trois quartiers” (juif, chrétien et musulman), poursuit-il, car “elle est la capitale du peuple juif depuis 3.000 ans”.
Sans surprise les communistes et les écologistes voteront en faveur de la résolution, la “Palestine” étant un cheval de bataille de ces deux formations qui regrettent que ce vote n’ait aucun caractère contraignant.
Quant aux deux députés du Front national, ils ont des positions opposées. Marion Maréchal Le Pen est en faveur de la reconnaissance d’un Etat palestinien, qui est la position officielle du parti d’extrême-droite, alors que Gilbert Collard, député du Gard et secrétaire général du Rassemblement Bleu-Marine, a lui déclaré : “Si vous reconnaissez” l’Etat palestinien, “vous embrassez le Hamas, le terrorisme, la haine, la mort des villes d’Israël !” “Nous voulons un Etat palestinien, mais dans les conditions requises, pas dans ce désordre”.
Dimanche, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a qualifié d'”irresponsable” le vote du Parlement français. “Bien sûr que le vote du Parlement français nous inquiète (…) c’est même irresponsable”, a déclaré Benyamin Netanyahou aux journalistes d’i24news, précisant que la reconnaissance d’un Etat palestinien par la France serait une “grave erreur”.
“Ce que la France veut faire, c’est donner aux Palestiniens un Etat, sans paix, pour qu’ils puissent continuer à faire la guerre”, a encore dit Netanyahou.
Quelque 150 manifestants pro-israéliens se sont rassemblés vendredi près de l’Assemblée nationale. “Non à une résolution qui encourage les terroristes”, “pas de résolution pour un État fiction”, pouvait-on notamment lire sur les nombreuses pancartes distribuées aux manifestants, drapeaux israéliens noués autour du cou, réunis à l’appel d’une dizaine d’associations.
Cette résolution “est un signal de départ pour la communauté juive”, a dit Richard Abitbol, président de la Confédération des Juifs de France et amis d’Israël (CFJAI), qui regroupe la majorité des organisations présentes au rassemblement. “Nous sommes sur une pente extrêmement dangereuse, parce qu’il ne fait plus bon de vivre en tant que juif en France”, a-t-il ajouté.
Le député UMP de Paris Claude Goasgen, qui avait exprimé plus tôt dans l’hémicycle son opposition à la résolution, a fait part de sa “honte” vis-à-vis de ce “texte unilatéral” du Parti socialiste qui “fait une course de vitesse dans la démagogie pour récupérer l’électorat musulman”.
Un appel à une nouvelle manifestation mardi, jour du vote de la résolution à l’Assemblée, a été lancé avant la dispersion.